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Une personne passe devant plusieurs enseignes immobilières à vendre et vendues à Mississauga, en Ontario, le 24 mai.Nathan Denette/La Presse Canadienne

Jon Shell est directeur général de Social Capital Partners, une organisation à but non lucratif axée sur l’élargissement de l’accès à la propriété immobilière et commerciale.

Un récent rapport de la Banque du Canada a fait sensation en révélant que 30 % des achats de maisons résidentielles au cours des trois premiers mois de 2023 ont été effectués par des investisseurs et non par des personnes ayant l’intention d’occuper ces maisons. Ce chiffre était inférieur à 20 pour cent en 2014.

La croissance de la demande des investisseurs injecte du kérosène dans notre crise du logement.

Les investisseurs immobiliers ont exercé une pression à la hausse sur les prix et ont évincé les acheteurs d’une première maison qui, au cours de la même période, sont passés de 50 % à 42,5 % des ventes de maisons.

Mais même s’il semble finalement y avoir un large consensus politique en faveur d’un programme ambitieux visant à accroître l’offre de logements au Canada, une stratégie globale de demande qui répondrait à la surabondance d’investisseurs a manifestement été absente.

Cela doit changer.

L’opportunité est énorme. L’impact d’une réduction de moitié de la part des investisseurs dans les ventes de logements futurs, à un niveau qui ne serait pas significativement inférieur à celui d’il y a dix ans, serait à la fois immédiat et dramatique. Il ouvrirait environ 75 000 logements l’année prochaine aux acheteurs d’une première maison et, à mesure que l’offre de logements augmenterait, pourrait rendre plus d’un million disponibles au cours de la prochaine décennie. Le tout sans pelles supplémentaires et sans frais supplémentaires.

Si nous ne faisons rien dans ce domaine, trop de nouveaux logements iront aux investisseurs, réduisant ainsi l’impact d’une stratégie d’offre de logements indispensable.

Alors pourquoi cela n’a-t-il pas déjà été abordé ?

Cette question est largement politique. Les plus gros investisseurs – de loin – dans l’immobilier résidentiel sont des particuliers canadiens, ou investisseurs dits « familiaux ». Selon Statistique Canada, ils possèdent 23 pour cent de tous les condos et 11,2 pour cent de toutes les maisons en Ontario, ce qui est plus que les investisseurs corporatifs et étrangers réunis. D’autres provinces ont des taux similaires.

Les investisseurs familiaux ont tendance à être plus âgés, plus riches – et plus susceptibles de voter. C’est pourquoi les politiciens (qui sont aussi souvent eux-mêmes des investisseurs) ont tendance à se concentrer sur des cibles plus faciles, telles que les investisseurs et les entreprises étrangers.

Il n’est peut-être pas surprenant que cela ne fonctionne pas si bien jusqu’à présent. L’interdiction imposée cette année aux investisseurs étrangers n’a pas eu d’impact sur l’activité globale d’investissement.

Cependant, notre crise du logement modifie rapidement les calculs politiques.

Un récent sondage Pluriel Research a montré que 80 pour cent des Canadiens croient que les investisseurs font grimper le coût du logement, et 75 pour cent blâment spécifiquement les investisseurs familiaux. L’incapacité persistante à freiner la demande pourrait désormais comporter un réel risque politique, puisque 65 pour cent des Canadiens soutiennent les politiques visant à limiter les investissements dans le logement résidentiel. Les résultats sont cohérents selon les régions, les tendances politiques et les groupes d’âge. Même les mamans et les papas veulent que le gouvernement compte avec « maman et papa ».

La politique mise à part, une considération plus pratique est le rôle que jouent ces investisseurs dans la fourniture de logements locatifs. Alors que le Canada a largement cessé de construire des logements locatifs permanents au cours des dernières décennies, de petits investisseurs sont intervenus. Mais cette approche est maintenant largement considérée comme un échec politique catastrophique entraînant une augmentation massive des prix de location et éliminant les jeunes Canadiens de l’accession à la propriété.

Les engagements en faveur d’importants investissements publics dans des appartements abordables et la récente réduction de la TVH sur la construction de logements locatifs spécialement construits indiquent un changement de politique majeur. Les investisseurs familiaux devraient être beaucoup moins importants dans l’offre de logements locatifs à l’avenir.

L’impact de la crise sur les jeunes Canadiens a été profond. Dans un sondage Pluriel, lorsqu’on leur demande quelle émotion ils ressentent face au logement, 88 pour cent des Canadiens de moins de 35 ans disent s’inquiéter, 80 pour cent disent être en colère et 79 pour cent disent être désespérés. Plus de la moitié – 61 pour cent – ​​déclarent que la crise du logement affecte leur santé mentale, selon un récent sondage Abacus.

Ces sentiments sont tout à fait justifiés. Malgré une éducation et des emplois meilleurs que ceux de leurs parents, de nombreux jeunes ne pourront peut-être jamais accéder à la propriété avec eux.

Des options politiques simples sont disponibles pour réduire le nombre d’investisseurs immobiliers : des exigences croissantes en matière d’acompte et de droits de mutation immobilière pour les immeubles de placement freineraient la demande future des investisseurs. Imposer les plus-values ​​sur les immeubles de placement au même taux que les revenus réduirait la spéculation, avec moins d’impact sur les investisseurs axés sur les revenus de retraite. Certaines mesures pourraient être appliquées progressivement, devenant plus sévères pour les Canadiens les plus riches et avec chaque propriété supplémentaire, et devraient être accompagnées de stratégies similaires pour réduire la demande étrangère et celle des entreprises.

Dans le passé, un programme ambitieux axé uniquement sur l’offre aurait pu suffire. Mais la demande croissante des investisseurs résidentiels menace toute stratégie immobilière qui ne s’y attaque pas de front. Maintenant qu’il est clair que les politiciens seraient récompensés – et non punis – pour toute action visant à freiner la demande, il est temps d’être honnête à propos de maman et papa.

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