Opinion : La politique étrangère du Canada et sa politique intérieure concernant la guerre d’Israël contre le Hamas changent

Le vote à la Chambre des communes la semaine dernière sur la guerre menée par Israël contre le Hamas représente un changement dans la politique étrangère et intérieure du Canada.

Le gouvernement libéral soutient désormais nettement plus les droits des Palestiniens et moins l’État d’Israël que par le passé. Ce changement reflète l’évolution démographique et l’importance croissante des électeurs musulmans au sein de la coalition libérale.

Les partis libéraux et conservateurs ont un jour exprimé leur soutien sans réserve au droit d’Israël de se défendre contre ses voisins hostiles. Mais la communauté musulmane est en croissance au Canada. Aujourd’hui, ils représentent 5 pour cent de la population, contre 1 pour cent qui s’identifient comme juifs.

Bien que les données soient rares avant 2015, on pense que les Canadiens musulmans avaient tendance à préférer le Parti libéral au Parti conservateur. Ils étaient également moins susceptibles de voter que la population générale.

Mais le Parti conservateur de Stephen Harper a profondément irrité la communauté en parlant de « pratiques culturelles barbares » et en réfléchissant, pendant la campagne électorale de 2015, à l’interdiction aux fonctionnaires de porter le niqab. Pendant ce temps, le chef libéral Justin Trudeau promettait d’accueillir 25 000 réfugiés syriens au Canada s’il était élu.

Ces facteurs ont galvanisé les groupes communautaires pour encourager les musulmans à voter. Et ils l’ont fait. Selon un sondage Environics, 79 pour cent des musulmans éligibles ont voté aux élections de 2015, contre un taux de participation global de 68 pour cent. Soixante-cinq pour cent des électeurs musulmans ont voté pour le Parti libéral, contre 10 pour cent pour le NPD et seulement 2 pour cent pour les conservateurs. (Des entretiens téléphoniques auprès de 600 adultes à travers le Canada qui se sont identifiés comme musulmans ont été menés entre le 19 novembre 2015 et le 23 janvier 2016, avec une marge d’erreur attendue de plus ou moins 4 points de pourcentage 19 fois sur 20.)

Les Canadiens musulmans ont également fortement soutenu les libéraux lors des élections de 2019 et 2021. Le parti souhaite naturellement ne pas perdre ce soutien. On me dit que la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, mentionne souvent l’importante communauté musulmane de sa circonscription de Montréal. (Selon le recensement de 2021, 18 pour cent des habitants d’Ahuntsic-Cartierville s’identifient comme musulmans.)

C’est l’une des raisons pour lesquelles les dirigeants libéraux ont travaillé si puissamment pour trouver un moyen d’appuyer la motion du NPD de la semaine dernière qui aurait, entre autres mesures, reconnu l’État de Palestine. Le caucus libéral était profondément divisé sur la question. Ma collègue Marieke Walsh rapporte que des dizaines de députés libéraux étaient prêts à voter en faveur de la motion du NPD.

En fin de compte, presque tous les députés libéraux ont fini par voter pour une version édulcorée de la motion – la reconnaissance du statut d’État a été retirée de la table – tandis que trois députés libéraux ont voté contre. L’un d’eux, Anthony Housefather, envisage de rester au sein du caucus libéral.

Ce n’est pas simplement une question de calcul politique. De nombreux Canadiens sont profondément préoccupés par les souffrances de la population de Gaza alors que les Forces de défense israéliennes cherchent à éliminer les combattants du Hamas.

Les conservateurs jouissent de la clarté morale de leur soutien sans réserve à l’État d’Israël dans ce conflit. Le NPD met davantage l’accent sur le soutien des droits des Palestiniens.

Les libéraux ont tenté de garder les électeurs juifs et musulmans dans leur camp. Mais comme le suggère le vote de la semaine dernière, ils accordent de plus en plus une grande priorité aux droits des Palestiniens et à la communauté musulmane du Canada.

Comme les autres communautés religieuses, les musulmans ne sont pas monolithiques. Une personne qui vient du Sénégal au Canada peut avoir des valeurs et des priorités différentes de celles d’un Canadien qui vient de Syrie, du Pakistan ou d’Indonésie.

Et le sort des Palestiniens à Gaza n’est peut-être pas le seul problème qui influence les musulmans, qui luttent autant que les autres électeurs contre l’inflation, les taux d’intérêt et l’accessibilité au logement.

De nombreux nouveaux Canadiens viennent de sociétés socialement conservatrices. Certains électeurs musulmans pourraient être mal à l’aise face au ferme soutien du Parti libéral aux droits des Canadiens LGBTQ.

Enfin, les électeurs musulmans pour qui le soutien aux droits des Palestiniens est la question de vote pourraient être davantage attirés par le NPD que par les libéraux.

Quoi qu’il en soit, l’époque du consensus bipartisan libéral/conservateur en faveur d’Israël est révolue. C’est la nouvelle configuration du terrain.

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