Opinion : La tarification du carbone reste le meilleur moyen dont nous disposons pour soutenir une croissance économique à faible émission de carbone

Richard G. Lipsey est professeur émérite d’économie à l’Université Simon Fraser et a été conseiller économique auprès des gouvernements fédéral et provincial. Cette pièce est adaptée de une lettre ouverte signé par plus de 250 économistes.

En tant qu’économiste, j’ai consacré une grande partie de ma carrière à étudier la croissance économique. Aujourd’hui, alors que le changement climatique constitue une menace environnementale et économique importante, je soutiens les politiques climatiques qui réduisent les émissions à faible coût, répondent aux problèmes d’accessibilité financière, maintiennent la compétitivité des entreprises et soutiennent la transition du pays vers une économie à faibles émissions de carbone.

Les politiques canadiennes de tarification du carbone font toutes ces choses.

Il y a beaucoup de débats – et de désinformation – sur la tarification du carbone au Canada. Examinons certaines des affirmations des critiques et comparons-les avec les preuves.

Allégation : La tarification du carbone ne réduira pas les émissions de gaz à effet de serre.

Les faits montrent clairement que la tarification réduit les émissions à un coût inférieur à celui des autres approches. La tarification du carbone fonctionne parce que lorsque quelque chose coûte plus cher, les gens en utilisent moins.

Depuis que la tarification fédérale du carbone est entrée en vigueur en 2019, les émissions de GES du Canada ont diminué de près de 8 pour cent. Une étude récente de l’Institut canadien du climat montre que la tarification du carbone pour les industries et les consommateurs devrait représenter près de la moitié des réductions d’émissions du Canada d’ici 2030.

La tarification du carbone est l’approche la moins coûteuse car elle donne aux particuliers et aux entreprises la flexibilité de choisir la meilleure façon de réduire leur empreinte carbone. D’autres méthodes, comme la réglementation, sont généralement plus intrusives et rigides, et coûtent plus cher.

Plus nous recourrons à des politiques à faible coût pour atteindre nos objectifs climatiques, plus nous disposerons de ressources pour d’autres domaines tels que les soins de santé et l’éducation.

Allégation : La tarification du carbone fait augmenter le coût de la vie et est un cause majeure de l’inflation.

Les faits montrent que la tarification du carbone au Canada a eu un impact négligeable sur l’inflation.

La forte augmentation de l’inflation entre 2021 et 2023 est due à des facteurs principalement liés à la pandémie de COVID-19 et à la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Ces facteurs sont mondiaux, c’est pourquoi la plupart des pays avancés – même ceux qui n’ont pas de prix sur le carbone – ont connu une inflation similaire. Selon la Banque du Canada, la tarification du carbone a directement causé moins d’un vingtième de l’inflation au Canada au cours des deux dernières années.

C’est parce que la politique est conçue pour éviter d’augmenter le coût de la vie. Environ 90 pour cent des revenus fédéraux du prix du carbone sont reversés aux ménages. La plupart des familles reçoivent davantage de remises que ce qu’elles paient en tarification du carbone, en particulier celles à revenus faibles ou moyens. Les résidents ruraux bénéficient d’un rabais supplémentaire.

Toutefois, le changement climatique menace le bien-être économique des Canadiens, par exemple en augmentant le risque et la gravité des catastrophes naturelles. Ces conséquences coûteront à notre économie au moins 35 milliards de dollars d’ici 2030.

Allégation : cela fait cela n’a aucun sens d’avoir à la fois un prix sur le carbone et des réductions.

Les faits montrent que l’approche de prix et de rabais incite à réduire les émissions de carbone, tout en préservant le pouvoir d’achat global de la plupart des ménages.

La tarification du carbone augmente le coût des produits à forte intensité de carbone, de sorte que les consommateurs et les entreprises sont encouragés à adopter des options à faibles émissions de carbone, telles que des thermostats intelligents, des pompes à chaleur ou des véhicules hybrides/électriques.

Restituer la majeure partie des revenus de la tarification du carbone sous forme de remises ne compromet pas cet objectif ; les consommateurs sont toujours incités à réduire leurs émissions. Grâce à ces réductions, la plupart des ménages sont gagnants, car ils reçoivent un montant légèrement supérieur à ce que le ménage moyen dépense en tarification du carbone.

Allégation : La tarification du carbone nuit à la compétitivité des entreprises canadiennes.

Les faits montrent que le système canadien de tarification du carbone est conçu pour aider les entreprises à réduire leurs émissions à faible coût, tout en étant compétitives dans la nouvelle économie mondiale à faibles émissions de carbone.

Les industries les plus émettrices, comme celles du pétrole, de l’acier et du ciment, disposent d’un système de tarification du carbone « basé sur les résultats ». Il incite fortement les entreprises à réduire leurs émissions, tout en maintenant leur compétitivité internationale, afin qu’elles puissent rester rentables et créer des emplois au Canada. La tarification stimule également l’innovation en encourageant le développement et l’adoption de technologies à faibles émissions de carbone.

Allégation : La tarification du carbone n’est pas nécessaire.

Les critiques ont raison sur ce point, du moins en partie. Le Canada pourrait abandonner la tarification du carbone tout en atteignant ses objectifs climatiques en utilisant d’autres types de réglementations et de subventions – mais cela coûterait beaucoup plus cher.

Cependant, les opposants les plus virulents à la tarification du carbone ne proposent pas de politiques alternatives pour réduire les émissions et atteindre nos objectifs climatiques – et encore moins de politiques qui le feraient au même faible coût que la tarification du carbone.

Dans un monde aux ressources rares, il semble imprudent d’abandonner la tarification du carbone pour la remplacer par des méthodes plus coûteuses de réduction des émissions – ou, pire encore, ne prendre aucune mesure.

En bref, la tarification du carbone est le moyen le moins coûteux de réduire les émissions, de stimuler l’innovation verte et de soutenir la transition du Canada vers un avenir économique propre et prospère. Le débat public sur la tarification du carbone est une bonne chose, mais il doit s’appuyer sur des preuves solides.

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